Solidarité

Restos Bébés du Coeur…pour les mamans !

10 avril 2019

Mercredi. Jour des petits. Début d’après-midi. Temps clément mais petit vent…

J’arrive en avance au Resto Bébé du Coeur de la rue coustou, à Paris, pour m’entretenir avec la responsable, Lucienne Berchel, sur leur activité.

Le Resto Bébé n’ouvre que dans une heure et pourtant, en arrivant, je tombe nez à nez avec une maman, blottie sous le préau, à l’abri, donnant le sein à son petit.

Lucienne, gracieuse retraitée, à l’accent charmant, m’expliquera plus tard qu’ « elles arrivent très tôt oui ! Elles veulent être parmi les premières. Mais nous n’ouvrirons que quand tout sera prêt ! ».

Alors qu’elle nettoie, range, indique aux autres bénévoles quoi faire, distribue les tâches « Ah bah, Hedia, tiens, il faudra désinfecter les tables aussi. Et Sabine, s’il te plaît, tu peux trier les boîtes de lait ?», Lucienne s’inquiète, elle n’a pas même pas encore trouvé le temps de manger ! Qu’à cela ne tienne, Sabine, son bras droit, et elle, peuvent filer. Je reste là, avec les autres, pour aider. Ma mission ? « Tu mets les chaises ici, bbbbien alignées hein ? Et tu peux installer le tapis de jeu avec quelques coussins aussi. Merci ! » m’indique Lucienne avant de s’échapper acheter son repas de midi.

Autoritaire, méthodique, généreuse, impliquée…mais là, on peut le dire, Lucienne est un peu stressée. D’autant que ce satané mal de dos recommence à la lancer…

En attendant Lucienne qui reviendra manger dans ce bureau, un ami veille…

Ca y est, Lucienne revient. A peine le temps d’engloutir son plat, je suis déjà là, à réclamer mon entretien, vite vite avant que le Resto Bébé ne soit plein ! L’interview n’a pas débuté, qu’elle commence à me faire part de ses petites inquiétudes du moment « Quand je fais quelque chose je vais jusqu’au bout, je le fais bien, je n’arrive pas à a faire les choses à moitié. Faisons vite, il faut que je sois à mon poste, c’est moi qui accueille les mamans. » 

INTERVIEW LUCIENNE BERCHEL, RESPONSABLE DU RESTO BEBES DU COEUR COUSTOU

Qui êtes-vous Lucienne ?

Je suis une ancienne libraire, retraitée, qui a décidé de ne pas rester devant sa télé à regarder les problèmes et qui s’est dit qu’il fallait contribuer, essayer d’aider, participer. Un jour, je me suis dit, allez, j’y vais ! Quand il fallu choisir une association, j’ai tout de suite pensé aux Restos du Coeur. Ici, pas de politique, on ne regarde pas de quel côté les gens sont, ni de quelle couleurs ils sont, ni même leur religion. On reçoit tout le monde !

Quel a été votre parcours avant d’arriver à Coustou ?

J’ai commencé dans le 15ème arrondissement dans le Resto Bébé d’AllerayLes mamans me parlaient assez facilement. Je les écoutais, je les informais, ça se passait très bien.

Lorsque l’on m’a proposé de prendre la responsabilité de ce Resto Bébé, j’ai tout de suite accepté car il est près de chez moi. J’ai continué d’être bénévole au Resto Bébé d’Alleray, puis j’ai dû arrêter car la charge de travail ici à Coustou ne me permettais pas de faire les deux.

Quel est le rôle de Restos Bébé du Coeur ?

  • Accueillir les mamans qui ont des enfants de 0 à 18 mois.
  • Essayer de les aider du mieux qu’on peut, les écouter. Quelquefois elles ont juste besoin de parler Elles vivent dans des chambres d’hôtel pour la plupart ou chez elles, mais elles sont souvent seules avec leurs enfants. Elles n’ont pas beaucoup de moyens, donc elles sont contentes de venir ici passer un moment. Vous savez, c’est déjà pas mal !
  • Leur donner ce dont elles ont besoin pour le bébé : des couches, du lait, des petits pots, des produits de soin etc.

Pouvez-vous nous décrire un peu le profil des mamans qui viennent ici ?

Les femmes qui viennent au Resto Bébé du Coeur sont forcément inscrites aux Restos du Coeur. Ce sont des femmes qui sont très courageuses. La plupart sont originaires de pays d’Afrique. Il ne faut pas penser que comme elles sont étrangères, ce sont des feignantes qu’elles viennent pour être assistées. Pas du tout ! Quand elles racontent leur parcours, quand elles vous disent pourquoi elles sont là, c’est impossible de rester insensible .

Quelles sont les principales difficultés que vous rencontrez ?

  • Sans aucune hésitation, ne pas avoir de vêtements, chaussures, matériel de puériculture pour les enfants de 9 à 18 mois. Ce matériel nous manque pour travailler correctement ! Mais nous sommes une association, donc cette aide ne peut venir que des dons que nous pourrions recevoir.
  • Engager et fédérer les équipes. C’est primordial l’engagement, on ne vient pas là « pour faire bien ». Quand on prend la peine de s’inscrire dans une association comme celle ci, il faut vraiment s’engager. Personnellement, je travaille en tant que responsable au moins 4 jours par semaine, alors que le Resto Bébé est ouvert tous les mercredis de 14H à 16H pour les mamans. S’engager pour moi c’est être disponible, et ne pas prendre de rendez-vous le mercredi. En effet, il y a toute une préparation, puis un rangement à faire avant et après la réception des mamans. Et je dois transmettre cette envie à mon équipe pour ne pas que certaines se découragent et partent.

Lucienne, à son poste, prête à accueillir les mamans. « Tenez mesdames, un p’tit bonbon ! ». 4 mots clés pour résumer sa mission : DON, ECOUTE, AIDE, ENGAGEMENT.

UNE EQUIPE DEVOUEE

Pendant ce temps, les bénévoles arrivent au compte goutte. « Salut mesdames ! Ca va ? lance l’une d’entre elles. « Bah ça ira mieux après un café ! ». Bien rétorqué.

Outre Sabine et Lucienne, elles étaient 6 en tout ce jour là. Uniquement des femmes. Odette, la première arrivée comme bénévole, 73 ans. Hedia, petite nouvelle, 34 ans. Marie-France, 69 ans. Roxane, sa fille, 33 ans, et Maud, 69 ans.

Et Anne Ladevie, graphiste, bénévole ici depuis 8 mois, qui s’éclipse du groupe pour répondre à quelques-unes de mes questions…

Anne a choisi d’être bénévole ici « en partie pour les enfants ».

Ce qui ressort de notre entretien ?  La surprise d’Anne, qui ne s’attendait pas à çà. « Je m’attendais à une distribution de nourriture, comme le font les Restos du Cœur, je m’attendais à partager des repas  avec les mamans mais pas à ce type d’accueil qui est plutôt psychologiquefinalement. Elles ont besoin de parler. Nous, on est là pour les écouter. C’est assez difficile parce qu’on ne se sent pas toujours légitime. Ca n’est pas vraiment notre rôle de trouver des solutions concrètes à leurs problèmes. Problèmes de papier, de logement, de santé , finalement on n’a aucun levier. A part appeler deux ou trois numéros…et encore ! Mais bon… on essaye de les guider ! ».

Un centre finalement plus pour les mamans que pour les enfants. Anne constate : « Les enfants n’ont pas de problème en fait ! Là, on pourrait intervenir ! On a des anciennes pédiatres, des gens qui ont travaillé dans des PMI (ndlr : Centre de protection maternelle et infantile)…mais je réalise qu’on a peu de conseils à leur donner. Les mamans sont bien alertées par les PMI, elles sont bien conseillées. Et je dois dire qu’elles sont très vigilantes, très aimantes. »

Ce qui la touche particulièrement ? « La grande qualité de l’attention des mamans envers leurs enfants. On les sent heureux ! Et leur dignité exemplaire. Elles se plaignent très peu, même si nous on sait dans quelle grande difficulté elles sont parfois. »

Ce qui l’intrigue ?   » Beaucoup de mamans ont la même origine géographique, l’Afrique de l’Ouest. La plupart sont issues d’une immigration liée à l’excision de ces femmes dans les pays en question. Très peu viennent de pays en guerre

Trois mots ? « Fraternité  : entre nous et entre les mamans entre elles. Beaucoup de joie : les enfants courent partout et sont heureux, mais aussi de la peine : les parcours sont tous assez similaires… »

Cette année, en septembre, les Restaurants du Coeur fêteront leur 34 ans

13H50. Ces dames sont enfin prêtes à accueillir les mamans qui trépignent à la porte d’entrée. Reste encore à préparer les tickets. De jolis coeurs roses découpés avec des numéros attribués. « C’est pour que chacune ait un numéro. Comme à la sécu ! Pour pas qu’il y ait de chahut » s’amuse Odette.

C’est également elle qui est en charge de l’atelier l’atelier cuisine du jour !

  • Alors mesdames, aujourd’hui, sucré ou salé ? Ce sera soupe ou compote !
  • Ah et avant que j’oublie n’oubliez pas de me donner vos cartes pour qu’on puisse enregistrer votre venue.
  • Alors vous lavez d’abord vos légumes. Ensuite, pour éplucher les courgettes, prenez l’économe sur la table et mon petit truc, c’est un oui et un non ! Voilà, comme ça, vous alternez, un trait avec la peau, un trait sans.
  • Et maintenant, vous les coupez en petits morceaux et le baby cook va se charger de cuire et de finaliser votre petit pot !

LE PASSAGE D’UNE MAMAN, MME SATOU TRAORE, AU RESTO BEBE

Satou Traoré est ivoirienne. Si elle vient ici toutes les trois semaines avec son bébé, c’est pour recevoir « plus de couches et de lait »mais surtout, elle l’avoue, quand elle arrive chez elle, un simple regard sur son enfant suffit à l’apaiser « on voit sur le visage de mon bébé, il aime bien venir ici ! » . Et ces quelques heures passées aux Restos Bébé ce sont aussi des retrouvailles avec d’autres mamans. Satou raconte :  « souvent on se connaît, on rencontre de nouvelles personnes. On est là depuis 14H et quand on a fini, on sait qu’on pourrait partir mais comme on a des copines, on reste avec elles, après on cause, et on part ensemble ! ». Mais même si le Resto Bébé est d’une grande aide, elle dit se rendre également régulièrement à la distribution des Restos du Coeur pour obtenir des produits « pour nous mêmes, ainsi que pour les bébés ».

Pour retrouver toutes les activités et les horaires d’ouverture du Centre d’Accueil et de Distribution Alimentaire qui accueille les Restos Bébés du Coeur, rendez-vous au 4bis, rue Coustou, 75 018 Paris, et/ou cliquez par ICI.  Au programme : distribution relais, cours de français, bibliothèque, aide à la recherche d’emploi etc.

Pour être bénévole ou pour faire un don directement aux Restos Bébés du Coeur de Coustou, contactez Lucienne Berchel au 06 09 59 45 70. Elle se fera un plaisir de prendre rendez-vous avec vous et de vous accueillir !

Et bien sûr, ils en ont toujours besoin, pour soutenir l’association Les Restos du Coeur dans sa globalité et donner du temps et/ou de l’argent c’est par LA

Il était une fois… 2019